Côte d'Ivoire : l'IA au service de la désinformation menace la démocratie
En Côte d'Ivoire, l'IA est utilisée pour manipuler l'élection présidentielle, semant la division et menaçant la démocratie.
Une élection sous haute tension
Près de neuf millions d’électeurs ivoiriens sont appelés aux urnes ce samedi 25 octobre dans un climat politique extrêmement tendu. Le président sortant, Alassane Ouattara, brigue un quatrième mandat face à une opposition affaiblie par l’absence de ses principaux chefs de file, une situation qui interroge sur la légitimité démocratique de ce scrutin.
L’IA, arme de désinformation massive
Les autorités ivoiriennes s’inquiètent de la montée en puissance de la désinformation, notamment via l’intelligence artificielle. Les réseaux sociaux sont inondés de contenus générés par IA, conçus pour manipuler l’opinion publique et diviser les citoyens.
Parmi ces contenus, une chanson de reggae, style populaire chez les jeunes Ivoiriens, a été largement partagée. Les paroles, explicitement diffamatoires envers Alassane Ouattara, ont été créées en quelques minutes grâce à des applications d’IA. Un jeu d’enfant, selon Wilfried Touré, vidéaste :
"Il suffit simplement de deux applications : l’une pour les paroles, l’autre pour la mélodie. En quelques clics, l’IA génère une chanson prête à être diffusée."
Ces outils, accessibles à tous, permettent de falsifier la réalité avec une facilité déconcertante. Une autre vidéo, montrant le président français Emmanuel Macron tenant des propos jamais prononcés, a circulé massivement, semant le trouble parmi les électeurs.
Des deepfakes pour discréditer l’opposition
Les opposants ne sont pas épargnés. Des vidéos truquées montrent par exemple Tidjane Thiam, dont la candidature a été rejetée, en train de danser, ou Pascal Affi N’Guessan, ancien Premier ministre, détourné en "femme frivole" pour le discréditer.
"On a détourné cette photo pour faire penser que je m’étais déguisé en femme pour échapper à la police. C’est une tentative de destruction politique."
Ces manipulations, souvent hyperréalistes, trompent même les journalistes et les citoyens les plus vigilants. Un danger pour la démocratie, selon Marina Kouakou, spécialiste de la lutte contre la désinformation :
"Ces informations peuvent créer des soulèvements populaires, troubler la paix. L’IA devient un outil de division massive."
La Côte d’Ivoire face à l’urgence technologique
Consciente du risque, la Côte d’Ivoire a lancé une stratégie nationale pour encadrer l’usage de l’IA. Un label "Safe IA" sera créé pour garantir des contenus éthiques et certifiés. Une initiative nécessaire, mais qui arrive-t-elle à temps pour préserver l’intégrité du scrutin ?
Dans un contexte où la démocratie est fragilisée par des pratiques autoritaires et des outils technologiques dangereux, l’Union européenne pourrait jouer un rôle clé en soutenant les mécanismes de vérification et en renforçant la coopération internationale contre la désinformation.
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